(Cass. 3ème civ. 11 octobre 2018, n°17-18553)

Dans un arrêt du 11 octobre 2018, la Cour de cassation rappelle que la clause selon laquelle le preneur loue les lieux en l’état n’exonère pas le bailleur de son obligation de délivrance.

Dans cette affaire, un locataire sollicitait le remboursement de travaux qu’il avait dû effectuer pour raccorder les locaux loués au système de collecte des eaux usées et au réseau électrique. La Cour d’appel de Versailles avait rejeté sa demande au motif que le bail stipulait que le preneur déclare bien connaître les locaux loués et les prendre « dans l’état où ils se trouvent lors de son entrée en jouissance sans pouvoir exiger de travaux de quelque nature que ce soit ni remise en état de la part du bailleur ». La Cour de cassation rappelle tout d’abord qu’en application de l’article 1719 du Code civil, « le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée et d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée. »

En conséquence, la Cour de cassation censure l’arrêt de la Cour d’appel de Versailles en jugeant qu’« en statuant ainsi, sans constater l’existence d’une stipulation expresse du bail mettant, à la charge du preneur, le coût des travaux de raccordement aux eaux usées et d’installation d’un raccordement au réseau électrique, la cour d’appel a violé le texte susvisé ». Cet arrêt rappelle qu’il convient d’être particulièrement vigilant sur les conditions de prise de possession des lieux au moment de la rédaction et de la négociation des baux commerciaux.

Procédure civile– Précision sur la force probatoire d’un rapport d’expertise établi non contradictoirement (Cass. 3ème civ. 15 novembre 2018, pourvoi n°16-26172).

Dans un arrêt en date du 15 novembre 2018, la Cour de cassation confirme le caractère probatoire de rapports d’expertise établis non contradictoirement dès lors que les parties ont eu la possibilité d’en discuter librement dans le cadre de la procédure.

A l’occasion d’une demande de révision du loyer selon la valeur locative du bien, le locataire formait un pourvoi en cassation dans lequel il reprochait aux juges du fond de s’être fondés exclusivement sur deux rapports d’expertise qui n’avaient pas été réalisées contradictoirement : le premier ayant été établi lors d’une instance antérieure à laquelle le locataire n’était pas partie et le second unilatéralement à la demande du bailleur.

Le locataire invoquait une violation des principes du contradictoire et de l’égalité des armes prévus à l’article 16 du code de procédure civile et à l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La Cour de cassation rejette le pourvoi du locataire en jugeant que « dès lors que ces éléments avaient été soumis à la libre discussion des parties, la cour d’appel, devant qui n’était pas invoquée une violation de l’article 6, § 1, précité, a pu, sans violer le principe de contradiction, se fonder sur le rapport d’expertise judiciaire établi lors d’une instance opposant la bailleresse à son associé et sur le rapport d’expertise établi unilatéralement à la demande de celle-ci, dont elle a apprécié souverainement la valeur et la portée. »

A retenir : le défaut de contradiction lors de l’expertise ne prive pas de force probante le rapport d’expertise que celui-ci soit le fait d’un expert judiciairement missionné ou d’un expert retenu par l’une des parties.