La loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (« loi ELAN »), a été publiée au Journal Officiel du 24 novembre 2018. Le texte comporte 234 articles et apporte des modifications importantes dans de nombreux domaines du droit immobilier.
Il y a lieu de préciser que la plupart des mesures issues de la loi ELAN sont d’application immédiate ou sont entrées en vigueur le 1er janvier 2019. Néanmoins, certaines des dispositions de la loi n’entreront en vigueur qu’après la parution de décrets d’application.
C’est ici l’occasion de revenir sur quelques mesures phares de la loi dans les domaines du droit de la construction, de la copropriété, de l’urbanisme et du logement, étant précisé que cette présentation n’a évidemment aucun caractère exhaustif.
1.- Droit de la construction : évolution du régime de la VEFA
Parmi les diverses dispositions destinées à encourager les projets de construction, la loi Elan modifie en certains aspects le régime applicable à la VEFA dans le secteur protégé (immeubles d’habitation ou à usage mixte) :
• Consécration de la VEFA avec travaux réservés par l’acquéreur (article 75 de la loi Elan)
La loi Elan prévoit que le contrat préliminaire pourra comporter une clause par laquelle l’acheteur se réserve la réalisation de travaux de finition ou l’installation d’équipements après la livraison de l’immeuble. Le but est de permettre la cession en VEFA de biens « prêts à finir » ou « bruts de béton », ce que ne permettait pas jusqu’alors la réglementation applicable. Le contrat préliminaire devra comporter une clause en caractères très apparents stipulant que l’acquéreur accepte la charge, le coût et les responsabilités qui résultent de ces travaux, qu’il réalise après la livraison de l’immeuble (article L. 261-15 du CCH). Dans ce cas, le contrat préliminaire devra préciser :
– Le coût total du bien composé du prix convenu et du coût des travaux dont l’acquéreur se réserve l’exécution, ceux-ci étant décrits et chiffrés par le vendeur ;
– Le délai dans lequel l’acquéreur peut revenir sur sa décision de se réserver l’exécution des travaux. Si l’acquéreur exerce ce droit, le vendeur est tenu d’exécuter ou de faire exécuter les travaux initialement réservés.
L’entrée en vigueur de cette mesure est subordonnée à la publication d’un décret qui précisera les conditions d’application de la mesure et notamment la nature des travaux dont l’acquéreur peut se réserver l’exécution.
• Précisions sur les modalités de déclenchement et de mise en œuvre de la garantie d’achèvement (article 75 de la loi Elan)
Dans le cadre du secteur protégé, l’article L. 261-10-1 du Code de la construction et de l’habitation impose au vendeur de fournir à l’acquéreur une garantie de remboursement ou une garantie financière d’achèvement (GFA).La loi ELAN clarifie les modalités de déclenchement de la garantie financière d’achèvement en précisant qu’elle pourra être mise en œuvre en cas de « défaillance du vendeur caractérisée par une absence de disposition des fonds nécessaires à l’achèvement de l’immeuble. »
Par ailleurs, la loi ELAN offre la possibilité au garant de faire désigner, par ordonnance sur requête, un administrateur ad hoc, qui assure la maîtrise d’ouvrage de l’opération aux frais du garant.
Ces dispositions sont d’application immédiate.
2.- Droit de la copropriété : diverses modifications et habilitation du gouvernement à réformer par voie d’ordonnances (article 209 de la loi ELAN)
La loi ELAN apporte diverses modifications à la loi du 10 juillet 1965 portant statut de la copropriété. Par ailleurs, la loi ELAN habilite le gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances afin, d’une part, de moderniser le statut issu de la loi du 10 juillet 1965 (sous douze mois) et, d’autre part, de créer la partie législative d’un code relatif à la copropriété afin de regrouper et organiser l’ensemble des règles régissant le droit de la copropriété (dans un délai, cette fois, de vingt-quatre mois) (article 215 de la loi ELAN).
Parmi les dispositions prévues par la loi ELAN :
• Consécration par la loi des parties communes spéciales et des parties communes à jouissance privative (article 209 de la loi ELAN). La loi ELAN consacre la définition des parties communes spéciales et des parties communes à jouissance privative telles que retenues par la jurisprudence en disposant que :
– Les parties communes spéciales sont celles affectées à l’usage et à l’utilité de plusieurs copropriétaires,
– Les parties communes à jouissance privative sont les parties communes affectées à l’usage et à l’utilité exclusifs d’un lot.
La loi ELAN précise également que l’existence des parties communes spéciales et de celles à jouissance privative est subordonnée à leur mention expresse dans le règlement de copropriété, étant précisé que les syndicats des copropriétaires ont jusqu’au 23 novembre 2021 pour mettre, le cas échéant, leur règlement de copropriété en conformité. Cette mesure est d’application immédiate.
• Simplification de la procédure de vote aux AG (article 211 de la loi ELAN). La loi ELAN prévoit la possibilité pour les copropriétaires de :
– Participer à l’assemblée par visioconférence ou par tout autre moyen de communication électronique permettant une identification,
– Voter par correspondance avant la tenue de l’assemblée au moyen d’un formulaire. L’entrée en vigueur de cette mesure est toutefois subordonnée à la publication d’un décret qui précisera les conditions d’identification des copropriétaires usant de moyens de communication électronique pour participer à l’assemblée générale, les mentions du formulaire de vote par correspondance et ses modalités de remise au syndic.
• Raccourcissement du délai de prescription des actions personnelles (article 213 de la loi ELAN). Le régime des actions dites personnelles entre des copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat est unifié sur le délai de 5 ans du droit commun (article 2224 du Code civil) au lieu de 10 antérieurement. Cette mesure est d’application immédiate.
• Raccourcissement du délai de notification des décisions prises en AG de copropriété (article 213 de la loi ELAN). La loi ELAN prévoit que la notification du procès-verbal devra désormais intervenir dans un délai d’un mois à compter de la tenue de l’assemblée générale (et non plus deux mois). Cette mesure est d’application immédiate.
3.- Droit de l’urbanisme : volonté de favoriser la réalisation de projets d’aménagement, moderniser l’instruction et limiter les recours
La loi ELAN comporte des dispositions diverses, concernant notamment les documents et les autorisations d’urbanisme, les procédures d’aménagement ainsi que le contentieux de l’urbanisme. Par ailleurs, la loi ELAN habilite le gouvernement à légiférer par voie d’ordonnances afin, d’une part, de simplifier la hiérarchie des normes et, d’autre part, de préciser le rôle et le contenu du schéma de cohérence territoriale (sous dix-huit mois) (article 46 de la loi ELAN).
La loi ELAN crée par ailleurs de nouveaux outils : le projet partenarial d’aménagement (PPA) et la grande opération d’urbanisme (GOU) (article 1 de la loi ELAN).
Afin de favoriser la réalisation d’opérations d’aménagement de grande envergure, la loi ELAN crée le contrat de projet partenarial d’aménagement (PPA), lequel peut être conclu entre l’Etat, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, un établissement public territorial, la Ville de Paris, la métropole de Lyon, un Etablissement public territorial de la métropole du Grand Paris ou/et une ou plusieurs communes membres de l’EPCI concerné.
Une opération d’aménagement peut être qualifiée de grande opération d’urbanisme (GOU) lorsqu’elle est prévue par un contrat de projet partenarial d’aménagement et que, en raison de ses dimensions ou de ses caractéristiques, sa réalisation requiert un engagement conjoint spécifique de l’Etat et d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public cocontractant. La qualification de grande opération d’urbanisme permet de déroger à certaines règles de droit commun afin de faciliter le projet d’aménagement. L’objectif de ces nouveaux outils créés par la loi ELAN est de dépasser le cadre communal pour la mise en œuvre d’opérations d’aménagement complexes. Cette mesure est d’application immédiate.