(CA Paris 10 octobre 2018, n°15/24033)

Dans un arrêt du 10 octobre 2018, la Cour d’appel de Paris apporte un éclairage intéressant sur la question de la prescription applicable aux recours entre locateurs d’ouvrage. Pour rappel, depuis l’entrée en vigueur de la loi n°2008-561 portant réforme de la prescription en matière civile, le délai de prescription de l’action en responsabilité civile de droit commun se prescrit par 5 ans à compter de la manifestation du dommage (article 2224 du Code civil). Par ailleurs, l’article 1792-4-3 du Code civil issu de la même réforme dispose qu’en « dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux ».

Un débat s’est ouvert sur le point de savoir si les recours entre locateurs d’ouvrage doivent obéir aux délais de l’article 2224 (5 ans à compter de la manifestation du dommage) ou de l’article 1792-4-3 du Code civil (10 ans à compter de la réception). Dans une décision empreinte de pédagogie, la Cour d’appel de Paris tranche cette question en jugeant que :

« L’article 1792-4-3 ne mentionne effectivement pas la qualité du demandeur exerçant les actions en responsabilité contre les constructeurs et leurs sous traitants en dehors de celles régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2.

Cet article figure toutefois dans un chapitre consacré au ‘contrat de louage d’ouvrage et d’industrie’ et parmi des dispositions régissant les actions en responsabilité exercées par le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage en vue de la réparation de désordres de construction.

L’article 1792-4-3 du code civil ne concerne donc que les actions exercées par le maître de l’ouvrage ou l’acquéreur et non les actions en responsabilité (contractuelle ou délictuelle) formées par un constructeur à l’encontre d’un autre constructeur ou à l’encontre du sous traitant de ce dernier, de telles actions ne tendant pas à la réparation d’un désordre de construction mais à la fixation de la part contributive des constructeurs entre eux.

Il en résulte que les actions récursoires exercées par un constructeur contre un autre ou contre un sous traitant de ce dernier sur le fondement de la responsabilité contractuelle ou quasi délictuelle sont régies, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 , par l’article 2224 du code civil et non par l’article 1792-4-3 du même code lequel ne concerne que les actions exercées par le maître de l’ouvrage ou l’acquéreur. »

Une décision de la Cour de cassation est attendue afin de clore définitivement le débat.